Une branche ATMP en vue à l'ENIM ?
10/07/2021
Une branche ATMP en vue à l’ENIM ?
Patrick
CHAUMETTE
Professeur émérite de l’université de Nantes
La pêche est un secteur professionnel dangereux, avec plus d’accidents mortels qu’ailleurs. La prévention des risques professionnels est importante, à travers la réglementation des navires, les visites médicales, réalisées par le service de santé des gens de mer[i]. La profession de marin est une profession réglementée, encadrée par l’administration. Le travail est intensif, d’une longue durée (« A la pêche, le poisson commande ») et la rémunération à la part de pêche, ou l’intéressement aux captures, n’incitent pas à la prévention. L’employeur est soumis à une obligation générale de prévention et les contrôles administratifs interviennent, dans le cadre d’une réglementation complexe, de la part à la fois des affaires maritimes et des centres de sécurité des navires et de l’inspection du travail[ii]. Les autres activités maritimes, plaisance ou commerce présentent moins de risques de naufrage et d’accidents mortels, mais ne sont pas sans risques.
En France, 15 184 marins travaillent à la pêche en 2019, pour 14 048 au commerce, 4 753 aux cultures marines, 2 133 à la plaisance professionnelle et 2 250 dans les services portuaires (total 38 368). A la pêche l’essentiel des accidents intervient en mer (929 accidents sur le total de 1 887)[iii]. La survenue d’accidents du travail reste élevée dans les secteurs de la pêche (avec un indice de fréquence de 52 accidents du travail maritime, ATM, pour 1 000 marins) et du commerce (avec un indice de 42 ATM pour 1 000 marins). Cependant, dans ces deux secteurs, le nombre d’accidents du travail baisse de manière significative[iv]. Compte tenu des activités maritimes saisonnières, en vue d’une comparaison, il faut retenir un indice de fréquence de 73 pour la pêche et de 60 pour la marine marchande, pour 1 000 salariés à temps plein. Pour les salariés terrestres du secteur des transports, de l’eau, du gaz et de l’électricité, l’indice de fréquence est de 46,4 accidents du travail pour 1 000 salariés, et cet indice est de 34,5 AT pour 1 000 salariés pour l’ensemble des salariés des secteurs terrestres. 186 maladies professionnelles ont été reconnues en 2019, et ont donné lieu à un premier règlement de prestations par le régime spécial de sécurité sociale des marins, l’Établissement National des Invalides de la Marine (ENIM). La prédominance des pathologies est en relation avec l’amiante (34) et des troubles musculo-squelettiques (111), en raison de la sollicitation importante des membres.
En 1992, l’Institut Maritime de Prévention (IMP)[v] a été créé sous l’égide du Ministère chargé de la mer, de l’Etablissement National des Invalides de la Marine (ENIM), le régime spécial de sécurité social des marins[vi]. L’IMP est un organisme national à but non lucratif, qui assure une mission de prévention des risques professionnels maritimes et d'amélioration des conditions de vie et de travail au profit des gens de mer. Les partenaires sociaux participent à son conseil d’administration. Son siège social se trouve à Lorient. Si la protection de la santé et de la sécurité des marins incombe à l’armateur, au patron ou au capitaine, elle relève aussi de la responsabilité de chacun à bord. L’ENIM, régime de sécurité sociale des marins, n’était pas chargé de veiller au développement de la prévention des risques professionnels par le décret n° 53-953 du 30 septembre 1953. Ce rôle lui a été attribué par le décret n° 99-552 du 30 juin 1999, ce qui étend ses attributions[vii]. Pour sensibiliser aux risques en mer, l’ENIM réalise ainsi des campagnes de prévention et édite des supports d’information sur les dangers encourus.
La responsabilisation des employeurs passe par la reconnaissance et la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles (AT/MP), par la prise en charge par l’armateur d’un mois de soins, salaire et du rapatriement. Au sein du régime spécial des marins, le recours en faute inexcusable contre l’armateur est possible de nouveau depuis 2011. Les patrons pêcheurs peuvent s’assurer des conséquences d’une telle reconnaissance. Une nouvelle branche ATMP est en projet ; une cotisation patronale « virtuelle » semble prévue. Cette innovation est-elle susceptible de renforcer la prévention ? La prise en charge armatoriale représente 2,5 millions d’euros par année, quand les prestations accident du travail – maladie professionnelle coûtent 57 millions à l’ENIM, mais sont financés par le Régime général de sécurité sociale des travailleurs salariés (RGSSTS), et non par la filière maritime. Cette mutualisation est critiquée, car peu incitative à une meilleure prévention ; mais est-il envisageable de transférer un tel coût ?
1- Les accidents du travail et
maladies professionnelles maritimes.
Un rapport annuel présente les indicateurs sur la santé au travail des gens de mer. Il fait la synthèse des affections d’origine professionnelle survenues ou reconnues au cours de l’année 2018. Ces maladies sont la conséquence d’un accident ou d’une exposition à des facteurs toxiques au cours de la navigation. Cette étude concerne l’ensemble des marins ressortissants de l’Établissement national des invalides de la marine (ENIM). Ceux-ci naviguent à la pêche et aux cultures marines, au commerce, dans les entreprises portuaires ou à la plaisance professionnelle. Cette analyse entre dans le cadre des dispositifs de prévention des risques professionnels au travail maritime. Elle doit permettre d’orienter les actions des chefs d’entreprises, des préventeurs et des personnels de santé dans le domaine de la prévention des accidents du travail et permettre ainsi, d’assurer une protection accrue pour la santé des marins. Les données résultent de l’exploitation des déclarations des accidents du travail maritime (ATM), des maladies professionnelles auprès de l’Établissement national des invalides de la marine (ENIM) et des dossiers médicaux informatisés Esculape du Service de santé des gens de mer (SSGM)[viii]. Le rapport pour 2019 du Ministère de la Mer, « Accidents du travail et maladies professionnelles maritimes », fait état de 1 887 accidents du travail maritime, dont 1 598 avec arrêt de travail, pour 38 368 marins, avec un taux de fréquence de 60 pour 1 000 marins (équivalents temps plein), 75 à la pêche, contre 33,5 pour l’ensemble des activités terrestres, 45,3 pour l’industrie et les transports. Le taux de mortalité est de 7,24 à la pêche pour 10 000 marins, contre 3,64 pour l’ensemble du secteur maritime et 0,37 pour 10 000 salariés de toutes activités en France, 1, 01 dans le secteur du bâtiment et des travaux publics. En 2019, 11 décès ou disparitions à la pêche.
La notion de maladie professionnelle était à peu près inconnue du régime de sécurité sociale des marins, puisque les maladies survenues en cours de navigation étaient prises en charge, comme les accidents du travail[ix]. Le décret n° 96-929 du 21 octobre 1996 a pris en compte les risques d’exposition aux poussières d’amiante, avant même la création en 2000 du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (Fiva), car les navires étaient « pleins » d’amiante. Ensuite le décret n° 99-542 du 28 juin 1999 a amplifié le mouvement. Les marins atteints de maladies professionnelles peuvent prétendre à une indemnisation identique à celle prévue en cas d’accident du travail maritime. Selon l’article 21-4 du décret-loi du 17 juin 1938, modifié, est considérée comme maladie professionnelle la maladie ayant son origine dans un risque professionnel, essentiellement et directement causée par l’exercice d’une activité entraînant affiliation au régime de sécurité sociale des marins, et provoquant soit le décès de la victime, soit une incapacité physique permanente. La maladie doit avoir un rapport de causalité directe et principale avec un risque lié à l’activité professionnelle mari- time, ce qui exclut les maladies liées au travail, mais non causées par lui. Dans un premier temps, le lien essentiel et direct entre l’activité maritime et le décès ou l’incapacité permanente doit être démontré[x].
Depuis 1999, le nombre de demandes de reconnaissance de maladie professionnelle est passé de 49 à 289 en 2005. En 2004, 233 demandes ont été acceptées et 55 rejetées ; en 2015, ces chiffres s’établissent à 220 admissions, 186 en 2019. Les affections liées aux troubles musculo-squelettiques (tableau 57) concernent 111 cas, l’exposition aux poussières d’amiante (tableaux 30 et 30 bis) 34 cas, les surdités (tableau 42) 5 cas et les atteintes lombaires (tableau 98) 12 cas, en 2019.
2- La prise en charge armatoriale.
La loi du 21 avril 1898 concerne les accidents du travail maritime ; elle prévoit une responsabilité de plein droit, limitée, forfaitaire de l’employeur. Elle est parallèle à la loi industrielle et commerciale ou « terrestre » du 9 avril 1898 sur les responsabilités des accidents dont les ouvriers sont victimes dans leur travail, fondatrice de l’équilibre actuel de socialisation des atteintes dues aux risques professionnels. La loi maritime du 21 avril 1898 prend en compte les obligations armatoriales, nées des coutumiers : le marin blessé ou accidenté au service du navire est payé de ses loyers, pansé, rapatrié à la charge du navire, pendant éventuellement 4 mois. La Convention n° 55 de l’OIT de 1936 reprenait cette tradition. En cas d’accident survenu à bord, de maladie survenue ou contractée à bord, l’armateur doit assurer le rapatriement du marin, prendre en charge les frais médicaux, hospitaliers ou pharmaceutiques, maintenir le versement du salaire y compris l’indemnité de nourriture[xi]. Le décret du 28 janvier 1987 organise l’intervention de la Caisse Générale de Prévoyance de l’ENIM, dès la fin du premier mois de l’arrêt de travail. Certains armateurs sont exonérés de cette prise en charge armatoriale : les marins propriétaires embarqués sur des navires d’une longueur hors tout inférieure ou égale à 25 mètres armés à la petite pêche, à la pêche côtière, à la pêche au large, aux cultures marines, à la navigation côtière ou au pilotage.
Cette prise en charge armatoriale, d’un mois, pourrait-elle être
supprimée ? L’article 39 de la Convention 188 de 2007 de l’OIT prévoit
que :
1.
En l'absence de dispositions nationales applicables aux pêcheurs, tout
Membre adopte une législation ou d'autres mesures visant à garantir que les
armateurs à la pêche assurent la protection de la santé et les soins médicaux
des pêcheurs lorsque ces derniers sont employés ou engagés ou travaillent à
bord d'un navire battant son pavillon, en mer ou dans un port étranger. Cette
législation ou ces autres mesures doivent garantir que les armateurs à la pêche
acquittent les frais des soins médicaux, y compris l'aide et le soutien
matériels correspondants pendant la durée des traitements médicaux dispensés à
l'étranger jusqu'au rapatriement du pêcheur.
2. La législation nationale peut prévoir de décharger l'armateur à la pêche de sa responsabilité dans le cas où l'accident n'est pas survenu au service du navire de pêche ou si la maladie ou l'infirmité a été dissimulée lors de l'engagement ou si l'accident ou la maladie est imputable à une faute intentionnelle du pêcheur.
Il nous semble donc que, a contrario, la législation nationale peut prévoir l’intervention d’un régime de sécurité sociale, reposant sur la responsabilité de l’armateur à la pêche ou d’une assurance obligatoire d’indemnisation (art. 38), dès le premier jour suivant l’accident de travail ou la maladie professionnelle[xii]. La Norme A.4.2.1 « Responsabilité des armateurs » de la MLC de 2006, concernant la marine marchande, semble plus contraignante, en première lecture, se référant à une période qui ne peut être inférieure à 16 semaines. Mais la législation nationale peut exempter l’armateur de l’obligation d’acquitter les frais des soins médicaux, du logement et de la nourriture, ainsi que de l’inhumation, dès lors que la responsabilité en est assurée par les autorités publiques (Norme A.4.2.1-6). Le principe directeur B4.2.1-2 ‘Responsabilité de l’armateur » précise que la législation nationale peut prévoir que l’armateur cesse d’être tenu de prendre en charge les frais d’un marin malade ou blessé, dès que celui-ci peut bénéficier de prestations médicales dans le cadre d’un régime d’assurance maladie ou d’assurance obligatoire ou d’indemnisation des travailleurs accidentés.
Cette question est essentielle dans les discussions en cours, quant à un projet de branche AT/MP.
3 – Recours en faute inexcusable
de l’employeur.
Il n’existe ni cotisations incitatives, ni action récursoire de l’ENIM pour défaut de prévention. La prévention relève essentiellement des armateurs sous le contrôle des inspecteurs de sécurité des navires, chargés de la prévention des risques professionnels, et des inspecteurs du travail, chargé également de contrôler la prévention des risques professionnels. L’ENIM verse des prestations sociales, en tant qu’assureur légal de la responsabilité des employeurs, mais dans un cadre forfaitaire limité. La responsabilisation des acteurs ne semble relever ainsi que d’une éventuelle répression pénale et des mécanismes du droit commun de la sécurité sociale, en cas de recours en faute inexcusable de l’employeur.
La loi du 21 avril 1898, comme la loi « terrestre » du 9 avril
1898, permettait le recours au droit commun de la responsabilité civile, et
donc l’indemnisation complémentaire de la victime, en cas de faits
intentionnels ou de faute lourde d’un tiers, de l’armateur ou d’un membre de
l’équipage. La loi du 29 décembre 1905 limita ce recours à la faute
intentionnelle ou inexcusable de l’armateur, tout en l’élargissant à toute
faute d’un tiers. La responsabilité de l’armateur pour une faute inexcusable du
capitaine de navire parut donc exclue, d’autant que de moins en moins de
capitaines recrutaient eux-mêmes leur équipage. Le décret-loi du 17 juin 1938
abrogea la loi du 29 décembre 1905 et supprima toute référence à la faute
inexcusable de l’armateur. Alors même que l’éventuelle faute inexcusable ou
intentionnelle du marin, victime d’un accident du travail était prévue, le
régime maritime devenait totalement asymétrique. Seule la faute intentionnelle
de l’armateur permettait l’indemnisation complémentaire des préjudices subis,
car heureusement irréel. Les marins, victimes d’accident du travail, se sont
parfois tournés vers la voie pénale, en vue d’une indemnisation complémentaire
pour infraction intentionnelle[xiii].
« L’institution d’un régime de sécurité sociale qui se substitue partiellement à la responsabilité de l’employeur et ne réserve la possibilité d’agir contre ce dernier qu’en cas de faute inexcusable ou intentionnelle trouve sa justification dans la conciliation entre, d’une part, le principe de responsabilité et, d’autre part, la mise en œuvre des exigences résultant du onzième alinéa du Préambule de 1946, la protection de la santé et de la sécurité »[xiv]. Le Conseil constitutionnel a ouvert, à nouveau, aux gens de mer affiliés à l’ENIM, victimes d’un accident du travail maritime ou d’une maladie professionnelle, le même recours en indemnisation complémentaire, en cas de reconnaissance de la faute inexcusable de l’armateur, devant le pôle social du tribunal judiciaire[xv]. L’article 70 de la loi du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014 rend applicables aux marins affiliés à l’ENIM les dispositions du livre IV du code de la sécurité sociale relatives à la faute inexcusable de l’employeur[xvi]. Ces dispositions s’appliquent même vis-à-vis d’un marin embarqué irrégulièrement, sans brevet adéquat et sans contrat écrit[xvii].
Les conséquences de la faute inexcusable étant assurable, à la différence des celles de la faute intentionnelle, il est important que les partons de pêche soient assurés face à une telle éventualité.
4 – Vers une branche ATMP ?
Si le régime des pensions des marins reste spécifique, au fil du temps la Caisse Générale de Prévoyance de l’ENIM perd ses particularités, à l’exception des cotisations sur salaires forfaitaires, déterminés par l’administration selon 21 catégories de navigation[xviii], et non portant sur les salaires réels. Dans le cadre de l’article 46 de la loi n° 2016-816 du 20 juin 2016 pour l’économie bleue, le Conseil supérieur des gens de mer a adopté un rapport sur les axes possibles d’adaptation du régime de protection sociale des marins, le 4 mai 2017. Ce Conseil supérieur, consultatif, considère que le régime de protection sociale des gens de mer est globalement bien adapté aux activités maritimes, y compris les cotisations et contributions sur les salaires forfaitaires[xix]. La création d’une branche accident du travail-maladie professionnelle au sein de l’ENIM est fortement envisagée, sans que la répartition de la charge financière entre la contribution des armateurs et la cotisation des marins soit explicitée. Le comité interministériel de la mer du 17 novembre 2017 a confirmé cette orientation, sans cotisation supplémentaire pour les navigants, sans précision sur une éventuelle contribution patronale[xx].
Traditionnellement en France, la cotisation sociale en matière d’accident du travail et de maladie professionnelles est exclusivement patronale, puisqu’elle couvre une assurance légale de responsabilité des employeurs, depuis les lois d’avril 1898 et l’intégration des prestations dues au sein du Régime Général de sécurité sociale des travailleurs salariés (RGSSTS). Cette cotisation patronale est à géométrie variable, selon les secteurs professionnels et la taille des entreprises. Plus la taille de l’entreprise augmente, plus le taux est individualisé et prend en compte la fréquence et la gravité des sinistres survenus. Elle est fixée par la Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT)[xxi]. Cette variabilité est censée responsabiliser les entreprises, même si la fonction préventive est difficile à démontrer et a été critiquée[xxii]. « La multitude des règles qui s’appliquent peut faire perdre de vue ce lien entre sinistralité et cotisation »[xxiii]. Les chantiers du bâtiment et des travaux publics ont de nombreux accidents du travail ; la cotisation patronale est plus élevée que les autres secteurs ; le bâtiment a développé la préfabrication, s’efforce d’encadrer les risques dues à la co-activité sur les chantiers, développe la prévention, mais reste un secteur accidentogène, qui cotise plus que les autres.
Le secteur de la pêche est comparable. Si le nombre d’accidents du travail baisse depuis 20 ans, leur gravité de diminue pas ; les accidents mortels restent nombreux d’une dizaine chaque année. En 2018, les accidents maritimes mortels y ont été 14 fois plus importants que la moyenne française et 6 fois plus fréquents que dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, secteur réputé le plus accidentogène en France. Si on ne considère que la pêche, le taux de survenue d’un accident mortel a été 31 fois supérieur à la moyenne, et 13 fois à celui du BTP. Les naufrages et chutes à la mer constituent les premières causes d’accidents mortels.
En 2016, les dépenses du régime de sécurité sociale des marins, charges de gestion incluses, pour le risque AT/MP s’élèvent à 64,318 Millions d’euros. Ce montant est à rapprocher, pour la même année, du coût de la prise en charge armateurs : environ 2,5 M€. Le rapport préparatoire de l’ENIM suggère que les employeurs soient informés annuellement de la cotisation virtuelle dont il devrait s’acquitter, si cette branche ATMP de l’ENIM devait être équilibrée par ses seules ressources, qu’après une période de trois années une véritable cotisation patronale puisse intervenir si l’armateur dépasse un certain taux. D’une part l'absence de cotisations supplémentaires est suggéré, du fait des difficultés du secteur maritime, avec le principe d’une contribution de la Caisse Nationale de l’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés (CNAMTS) à la branche AT/MP de l'ENIM sur la base du dernier niveau atteint[xxiv], et d‘autre part l’incitation (via les mécanismes de responsabilisation décrits plus haut) à réduire le coût de cette contribution grâce aux actions de prévention individuelles et collectives mises en œuvre par la profession elle-même. Le gain financier ainsi obtenu serait alors réparti entre un "retour sur investissement" pour le régime général et un financement des actions de prévention mises en place par le secteur maritime. Dans le cas où les dépenses augmenteraient, un financement additionnel interviendrait sous forme d’une cotisation solidaire, répartie sur l’ensemble des armateurs afin d’équilibrer la branche ATMP. Il semble nécessaire de créer un Observatoire de l'accidentologie maritime permettant de responsabiliser les professionnels, sous l'égide des administrations chargées de la tutelle du régime social des marins[xxv].
Renforcer la prévention est indispensable. Responsabiliser les entreprises l’est tout autant. Une branche ATMP sans cotisation ATMP semble étrange, même si son caractère variable est au fond prévu à l’échelon du secteur maritime et non des entreprises. L’absence de distinction marine marchande – pêche interroge. Les recours en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur assurent l’essentiel de la responsabilisation des entreprises.
[i] P. CHAUMETTE, « De la prévention à la pêche maritime - Protéger les marins
autant que la ressource halieutique ? »,
Rev. Française des Affaires Sociales,
RFAS, Paris, n° 2-3, Santé et
travail : connaissances et reconnaissances, 2008, pp. 323-339.
[ii] P. CHAUMETTE, « Les
risques professionnels à la pêche : prévention et responsabilisation », Colloque
de Vigo, 1er et 2 juillet 2021, Los desafíos
de la pesca sostenible - Les
défis de la pêche durable, Marcial Pons Ed., Madrid, (à
paraître).
[iii]
M. CHARVET, F. LAURIOUX & G. LAZUECH, « Quand la pénibilité du travail
débarque. Les temps des pêcheurs et de leurs conjointes », Revue Travail et Emploi, n°147,
« Quand la pénibilité du travail s’invite à la maison », La
Documentation Française, 2016-3, http://www.cairn.info/revue-travail-et-emploi-2016-3.htm - J. GIL PLANA, “La jornada de trabajo en el mar”, In El trabajo en el mar : los nuevos escenarios jurídico-marítimos, J. CABEZA PEREIRO & E.
RODRIGUEZ RODRIGUEZ (Coord.), Ed. Bomarzo, Albacete, España, 2015, pp. 433-
444.
[iv] Accidents du travail et maladies professionnelles maritimes-
Bilan 2019, Ministère de la Mer, Direction générale des
Infrastructures, des Transports et de la Mer, Direction des affaires maritimes
,
Service de santé des gens de mer.
[v] Institut
maritime de Prévention, www.institutmaritimedeprevention.fr
[vi] ENIM, le régime social des marins, www.enim.eu
[vii] Décret n° 99-552, 30 juin 1999
modifiant le décret n° 53- 953 du 30 septembre 1953 relatif à l’organisation
administrative et financière de l’Établissement national des invalides de la
marine, JORF 3 juillet, p. 9894 -
J.Fr. JOUFFRAY, « Le régime de sécurité sociale des marins et la
prévention des risques professionnels », in La prévention des risques
professionnels à la pêche, Journées 2005 de l’Observatoire des Droits des
Marins, Maison des sciences de l’Homme Ange Guépin, Nantes, mars 2005, p. 107.
[viii] Accidents du travail et maladies professionnelles maritimes - Bilan
2019, Ministère de la Mer, Direction
générale des Infrastructures, des Transports et de la Mer, Direction des
affaires maritimes
, Service de santé des gens de mer.
[ix] P. CHAUMETTE (dir.), Droits Maritimes, Dalloz Action, 4ème
éd., 2021, n° 422.27.
[x] Cass. civ. 2ème,
12 mars 2009, n°
07-20.298, DMF 2010. p. 47,
« De la reconnaissance des maladies
professionnelles maritimes ».
[xi] C. Transports, art. L. 5542-21 à L.
5542-28 et art. 3 Décret-Loi du 17 juin 1938.
[xii] X.M. CARRIL VASQUEZ, “Protección
en cas de enfermedad, lesión o muerte relacionadas con el trabajo –art. 38 y
39”, in Estudio técnico-jurídico del
Convenio 188, sobre el trabajo en la pesca (2007, de la Organización
Internacional del Trabajo – Están garantizadas unas condiciones de trabajo
decentes?, P. CHAUMETTE, O. FOTINOPOULOU-BASURKO, X.M. CARRIL VASQUEZ
(Coord.), Thomson Reuters, Aranzadi, Cizur Menor, 2018, pp. 285-297.
[xiii] CA Rennes, 3ème ch.
corr., 25 janvier 2005, n° 197/05, Lefèvre, chalutier Vierge de l’Océan, DMF 2006,
p. 488, note P. CHAUMETTE -
Cass. crim. 20 septembre 2005, n° 04-82.847, navire
Angélique-Émilie, DMF 2006, p. 584, note P. CHAUMETTE - .Cass. crim.
13 mars 2007, n°
06-85.422, chalutier La Normande, DMF 2007. 881, note P. BONASSIES – P.
CHAUMETTE, « Du capitaine responsable de la préservation du navire, de sa
cargaison et de la sécurité des personnes se trouvant à bord », Annuaire de
Droit Maritime et Océanique université de Nantes, 2008, t. XXVI, pp.
411-437.
[xiv] Conseil constitutionnel 18 juin
2010, n° 2010-8
QPC, Rec. p. 117 ; AJDA 2010. 1232 ; D. 2011. 768, Chron.
P. SARGOS ; obs. V. BERNAULD et L. GAY ; Dr. soc. 2011. 1208, note X.
PRÉTOT ; RDT 2011. 186, obs. G. PIGNARRE- ; RDSS 2011. 76, note
S. BRIMO ; M. BADEL, « Accidents du travail, maladies professionnelles :
l’indemnisation soumise à la “question” » ; Dr. ouvrier 2010, n° 279, 639 ; DMF
2010. 688.
[xv] Conseil constitutionnel 6 mai
2011, n° 2011-127
QPC, Dr. soc. 2011, n° 7, p. 862, obs. P. CHAUMETTE, « Du recours en
faute inexcusable de l’armateur en cas d’accident du travail maritime », DMF
2011, p. 623 ; D. 2012. 901, obs. P. LOKIEC et J. PORTA – Civ. 2ème,
22 sept. 2011, n°
09-15.756, D. 2011. 2343 ; DMF 2012, n° 732. 35, «
L’indemnisation du marin victime de l’amiante » – Civ. 2ème, 15 déc.
2016, n° 15-
25.780, DMF 2017, p. 208, « Reconnaissance de la faute inexcusable de
l’employeur à la suite d’un accident du travail maritime ».
[xvi] C. Sécurité Sociale, art. L. 412-8,
8°.
[xvii] Cass. civ. 2ème, 15
juin 2017, n° 15-24.510,
Enim, navire Vent Divin, P ; Dr. soc. 2017, n° 2, p.
1089-1092, note P. Chaumette ; DMF 2017. 809, « La faute inexcusable de l’employeur
vis-à-vis d’un marin embarqué irrégulièrement ».
[xviii] Arrêté du 17 mars 2021 portant majoration des salaires forfaitaires
servant de base de calcul des contributions des armateurs, des cotisations et
de certaines prestations des marins du commerce, de la plaisance, de la pêche
et des cultures marines – P. CHAUMETTE, Droits
Maritimes, préc. n° 423.12 « Historique ».
[xix] P. CHAUMETTE, Droits Maritimes, préc., n° 423.14, « Salaire forfaitaire et
rapport démographique ».
[xx] P. CHAUMETTE, « Vers la branche
accident du travail – maladie professionnelle de l’ENIM », obs. sous CA Aix-en-Provence,
14ème ch., 22 novembre 2017, RG n° 2017/1672, DMF 2018, p. 218.
[xxi] C. Sécurité Sociale, art. L. 242-5
à L. 242-7-1, art. D. 242-6 à D 242-6-23 - M. JEANTET et A. THIEBEAULD,
« Les missions de la branche AT/MP », Ecole Nationale Supérieure de
Sécurité Sociale, Rev. Regards
2017/1, n° 51, pp. 33-49.
[xxii] J.J. DUPEYROUX « Préface :
Faux problèmes et vraies impasses », colloque Améliorer la législation des accidents du travail, Droit Social, 1990, n°9-10, pp. 683-689 –
P. CHAUMETTE, « L’activation du lien réparation-prévention », ibidem,
pp. 724-733 – P. LENGAGNE, « Inciter les entreprises à améliorer la santé
au travail – La tarification à l’expérience dans les systèmes d’assurance des
risques professionnels », Rev. Regards,
2017, n° 1, pp. 51-61.
[xxiii] M. JEANTET, « Les enjeux de la
branche AT/MP », Rev. Regards,
2017/1, n° 51, pp. 85-98, sp. p. 92.
[xxiv] 64 millions d’euros en 2016, 57,1
millions d’euros en 2019.
[xxv] J.Fr. JOUFFRAY, R. DECOTTIGNIES et
a., « Rapport sur la création d’une branche ATMP au sein du régime de
sécurité sociale des marins », ENIM, avril 2019.
[i] P. CHAUMETTE, « De la prévention à la pêche maritime - Protéger les marins
autant que la ressource halieutique ? »,
Rev. Française des Affaires Sociales,
RFAS, Paris, n° 2-3, Santé et
travail : connaissances et reconnaissances, 2008, pp. 323-339.
[ii] P. CHAUMETTE, « Les
risques professionnels à la pêche : prévention et responsabilisation », Colloque
de Vigo, 1er et 2 juillet 2021, Los desafíos
de la pesca sostenible - Les
défis de la pêche durable, Marcial Pons Ed., Madrid, (à
paraître).
[iii]
M. CHARVET, F. LAURIOUX & G. LAZUECH, « Quand la pénibilité du travail
débarque. Les temps des pêcheurs et de leurs conjointes », Revue Travail et Emploi, n°147,
« Quand la pénibilité du travail s’invite à la maison », La
Documentation Française, 2016-3, http://www.cairn.info/revue-travail-et-emploi-2016-3.htm - J. GIL PLANA, “La jornada de trabajo en el mar”, In El trabajo en el mar : los nuevos escenarios jurídico-marítimos, J. CABEZA PEREIRO & E.
RODRIGUEZ RODRIGUEZ (Coord.), Ed. Bomarzo, Albacete, España, 2015, pp. 433-
444.
[iv] Accidents du travail et maladies professionnelles maritimes-
Bilan 2019, Ministère de la Mer, Direction générale des
Infrastructures, des Transports et de la Mer, Direction des affaires maritimes
,
Service de santé des gens de mer.
[v] Institut
maritime de Prévention, www.institutmaritimedeprevention.fr
[vi] ENIM, le régime social des marins, www.enim.eu
[vii] Décret n° 99-552, 30 juin 1999
modifiant le décret n° 53- 953 du 30 septembre 1953 relatif à l’organisation
administrative et financière de l’Établissement national des invalides de la
marine, JORF 3 juillet, p. 9894 -
J.Fr. JOUFFRAY, « Le régime de sécurité sociale des marins et la
prévention des risques professionnels », in La prévention des risques
professionnels à la pêche, Journées 2005 de l’Observatoire des Droits des
Marins, Maison des sciences de l’Homme Ange Guépin, Nantes, mars 2005, p. 107.
[viii] Accidents du travail et maladies professionnelles maritimes - Bilan
2019, Ministère de la Mer, Direction
générale des Infrastructures, des Transports et de la Mer, Direction des
affaires maritimes
, Service de santé des gens de mer.
[ix] P. CHAUMETTE (dir.), Droits Maritimes, Dalloz Action, 4ème
éd., 2021, n° 422.27.
[x] Cass. civ. 2ème,
12 mars 2009, n°
07-20.298, DMF 2010. p. 47,
« De la reconnaissance des maladies
professionnelles maritimes ».
[xi] C. Transports, art. L. 5542-21 à L.
5542-28 et art. 3 Décret-Loi du 17 juin 1938.
[xii] X.M. CARRIL VASQUEZ, “Protección
en cas de enfermedad, lesión o muerte relacionadas con el trabajo –art. 38 y
39”, in Estudio técnico-jurídico del
Convenio 188, sobre el trabajo en la pesca (2007, de la Organización
Internacional del Trabajo – Están garantizadas unas condiciones de trabajo
decentes?, P. CHAUMETTE, O. FOTINOPOULOU-BASURKO, X.M. CARRIL VASQUEZ
(Coord.), Thomson Reuters, Aranzadi, Cizur Menor, 2018, pp. 285-297.
[xiii] CA Rennes, 3ème ch.
corr., 25 janvier 2005, n° 197/05, Lefèvre, chalutier Vierge de l’Océan, DMF 2006,
p. 488, note P. CHAUMETTE -
Cass. crim. 20 septembre 2005, n° 04-82.847, navire
Angélique-Émilie, DMF 2006, p. 584, note P. CHAUMETTE - .Cass. crim.
13 mars 2007, n°
06-85.422, chalutier La Normande, DMF 2007. 881, note P. BONASSIES – P.
CHAUMETTE, « Du capitaine responsable de la préservation du navire, de sa
cargaison et de la sécurité des personnes se trouvant à bord », Annuaire de
Droit Maritime et Océanique université de Nantes, 2008, t. XXVI, pp.
411-437.
[xiv] Conseil constitutionnel 18 juin
2010, n° 2010-8
QPC, Rec. p. 117 ; AJDA 2010. 1232 ; D. 2011. 768, Chron.
P. SARGOS ; obs. V. BERNAULD et L. GAY ; Dr. soc. 2011. 1208, note X.
PRÉTOT ; RDT 2011. 186, obs. G. PIGNARRE- ; RDSS 2011. 76, note
S. BRIMO ; M. BADEL, « Accidents du travail, maladies professionnelles :
l’indemnisation soumise à la “question” » ; Dr. ouvrier 2010, n° 279, 639 ; DMF
2010. 688.
[xv] Conseil constitutionnel 6 mai
2011, n° 2011-127
QPC, Dr. soc. 2011, n° 7, p. 862, obs. P. CHAUMETTE, « Du recours en
faute inexcusable de l’armateur en cas d’accident du travail maritime », DMF
2011, p. 623 ; D. 2012. 901, obs. P. LOKIEC et J. PORTA – Civ. 2ème,
22 sept. 2011, n°
09-15.756, D. 2011. 2343 ; DMF 2012, n° 732. 35, «
L’indemnisation du marin victime de l’amiante » – Civ. 2ème, 15 déc.
2016, n° 15-
25.780, DMF 2017, p. 208, « Reconnaissance de la faute inexcusable de
l’employeur à la suite d’un accident du travail maritime ».
[xvi] C. Sécurité Sociale, art. L. 412-8,
8°.
[xvii] Cass. civ. 2ème, 15
juin 2017, n° 15-24.510,
Enim, navire Vent Divin, P ; Dr. soc. 2017, n° 2, p.
1089-1092, note P. Chaumette ; DMF 2017. 809, « La faute inexcusable de l’employeur
vis-à-vis d’un marin embarqué irrégulièrement ».
[xviii] Arrêté du 17 mars 2021 portant majoration des salaires forfaitaires
servant de base de calcul des contributions des armateurs, des cotisations et
de certaines prestations des marins du commerce, de la plaisance, de la pêche
et des cultures marines – P. CHAUMETTE, Droits
Maritimes, préc. n° 423.12 « Historique ».
[xix] P. CHAUMETTE, Droits Maritimes, préc., n° 423.14, « Salaire forfaitaire et
rapport démographique ».
[xx] P. CHAUMETTE, « Vers la branche
accident du travail – maladie professionnelle de l’ENIM », obs. sous CA Aix-en-Provence,
14ème ch., 22 novembre 2017, RG n° 2017/1672, DMF 2018, p. 218.
[xxi] C. Sécurité Sociale, art. L. 242-5
à L. 242-7-1, art. D. 242-6 à D 242-6-23 - M. JEANTET et A. THIEBEAULD,
« Les missions de la branche AT/MP », Ecole Nationale Supérieure de
Sécurité Sociale, Rev. Regards
2017/1, n° 51, pp. 33-49.
[xxii] J.J. DUPEYROUX « Préface :
Faux problèmes et vraies impasses », colloque Améliorer la législation des accidents du travail, Droit Social, 1990, n°9-10, pp. 683-689 –
P. CHAUMETTE, « L’activation du lien réparation-prévention », ibidem,
pp. 724-733 – P. LENGAGNE, « Inciter les entreprises à améliorer la santé
au travail – La tarification à l’expérience dans les systèmes d’assurance des
risques professionnels », Rev. Regards,
2017, n° 1, pp. 51-61.
[xxiii] M. JEANTET, « Les enjeux de la
branche AT/MP », Rev. Regards,
2017/1, n° 51, pp. 85-98, sp. p. 92.
[xxiv] 64 millions d’euros en 2016, 57,1
millions d’euros en 2019.
[xxv] J.Fr. JOUFFRAY, R. DECOTTIGNIES et
a., « Rapport sur la création d’une branche ATMP au sein du régime de
sécurité sociale des marins », ENIM, avril 2019.