Un rapport ITF 2023 sur les abandons de marins très préoccupant
24/01/2024
La Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) a publié le 11 janvier 2024 ses chiffres sur le nombre de navires abandonnés en 2023 – qui montrent une augmentation inquiétante par rapport aux chiffres des années précédentes.
Au total, 132 abandons ont été signalés, soit 13 de plus qu'en 2022, soit une augmentation de 10,92 %. Moins de 20 cas par an étaient décomptés entre 2011 et 2016. En 2020, le nombre d’abandons a doublé avec 85 cas déclarés, contre 40 en 2019, 95 en 2021, selon les chiffres compilés par l’Organisation Internationale de Travail (OIT) et l’Organisation Maritime Internationale (OMI). La croissance très inquiétante se poursuit.
L’écrasante majorité de ces rapports (129) ont été rédigés par l’ITF.
En vertu de la Convention du travail maritime de 2006 (« MLC »), le marin est réputé être abandonné si l’armateur ne couvre pas les frais de rapatriement d’un marin ; ou les a laissés sans l'entretien et le soutien nécessaires ; ou a rompu unilatéralement ses liens avec eux, y compris en ne payant pas les salaires contractuels des gens de mer pendant une période d’au moins deux mois.
Les principales conclusions ont montré :
• Les salaires dus dans les 129 cas signalés par l'ITF dépassent 12,1 millions de dollars (11,02 millions d’euros).
• 1 676 marins ont contacté l'ITF à partir de navires abandonnés.
• Les marins indiens ont été les plus abandonnés, avec plus de 400 cas.
Mais le chiffre final dépassera 12,1 millions de dollars, car les cas prennent du temps à être résolus et à mesure que d'autres marins se manifesteront, augmentant ainsi le montant des salaires récupérables.
L’ITF a reçu jusqu’à présent plus de 10,9 millions de dollars (10,01 millions d’euros) de salaires dus par 60 de ces navires.
Les abandons de navires et de marins ont principalement lieu au Moyen-Orient, et très majoritairement aux Émirats arabes unis, ainsi qu’au Proche-Orient avec de nombreux navires stoppés en Turquie notamment, selon le bulletin Abandoned seafarer log qui répertorie tous les marins bloqués dans les ports suite à des défaillances de leurs armateurs.
Côté État du pavillon, et selon un classement établi par ITF, le Panama arrive en tête avec 23 navires, suivi de Palau dans le Pacifique (12) et du Cameroun (11). Viennent ensuite Saint Kitts and Nevis (8), les Comores (6), la Tanzanie (6) et le Togo (6).
Des directives sur la manière de traiter l'abandon des marins ont été adoptées par un groupe de travail tripartite conjoint de l'Organisation Internationale du Travail (OIT) et de l'Organisation Maritime Internationale (OMI), en décembre 2022. Ces directives visent à améliorer la coordination entre les pays, notamment les États du pavillon, les États du port, les États dont les gens de mer sont ressortissants ou résidents, et les États dans lesquels opèrent les services de recrutement et de placement, afin de résoudre plus rapidement les cas d'abandon, notamment en faisant en sorte que les gens de mer soient payés et rapatriés auprès de leur famille. En vertu de la Convention du travail maritime, 2006, les États du pavillon – le pays où un navire est immatriculé et/ou le pays dont le navire bat le pavillon – doivent veiller à ce qu'un système de garantie financière soit en place pour les navires battant leur pavillon.
Les nouvelles directives encouragent les États du pavillon à vérifier, au moins une fois par an, la validité de cette garantie financière. Les États du port sont encouragés à accorder une attention particulière à cette garantie financière lors de leurs inspections des navires étrangers qui visitent leurs ports. Les États où opèrent des services de recrutement et de placement sont également invités à vérifier régulièrement que ces services comportent un système permettant d'assurer la protection des gens de mer qu'ils recrutent et placent.
Les nouvelles directives définissent les procédures à suivre par les États si un armateur ne s'acquitte pas de son obligation d'organiser et de couvrir le coût du rapatriement des gens de mer, les salaires impayés et les autres droits contractuels, ainsi que la satisfaction des besoins essentiels, y compris les soins médicaux. Dans ces circonstances, les gens de mer sont alors considérés comme abandonnés.