Contentieux du travail maritime
Textes de référence
Art L. 1311-1, L. 5511-1, L. 5542-1, L. 5542-48 et L. 5621-8 Code des transports
Art. L. 211-3, R. 211-3-5 et R. 211-16 Code de l’organisation judiciaire.
Décret n° 2015-219 du 27 février 2015, modifié par décret n° 2021-456 du 15 avril 2021
Art. L. 1411-1, L. 1411-4 al. 2, L. 1333-1 à L. 1333-3, R. 1412-1, L. 2314-32 C. du travail
Synthèse
Le contentieux du travail en France est caractérisé par sa dispersion, la distinction des litiges individuels et collectifs. Les litiges individuels relèvent de la compétence du conseil de prud'hommes habituellement, mais du tribunal judiciaire (TJ) pour les marins, après tentative de conciliation devant le directeur départemental des territoires et de la mer (DDTM).
D'autre part, les litiges collectifs relèvent de la compétence du tribunal judiciaire (TJ), à la suite de la fusion du tribunal de grande instance (TGI) et du tribunal d'instance (TI), au 1er janvier 2020.
Le conseil de prud'hommes intervient quant au contentieux des marins embarqués sur les navires immatriculés à Wallis et Futuna, au contentieux du travail maritime international, sous pavillon étranger, et vis-à-vis des non marins, gens de mer ou non.
A savoir
La fusion des tribunaux d’instance (TI) et des tribunaux de grande instance (TGI) au sein du tribunal judiciaire (TJ), au 1er janvier 2020, a engendré une concentration inattendue du contentieux des relations de travail concernant les marins. Cependant, la compétence prud’homale concerne les gens de mer non marins et les non gens de mer, notamment.
Sommaire
Les litiges individuels liés au contrat d'engagement maritime : tribunal judiciaire
L’article L. 5542-48 du code des transports et l'article R. 211-3-5 du code de l’organisation judiciaire prévoient que les contestations relatives à la formation, l’exécution et la rupture du contrat de travail entre l’employeur et le marin relèvent du tribunal judiciaire. Cette instance est précédée d’une tentative de conciliation devant l’autorité compétente de l’Etat ; cette procédure préalable à la saisine du tribunal a été étendue au capitaine en différend avec son employeur, depuis l’entrée en vigueur de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019. La compétence commerciale pour les litiges entre le capitaine et son employeur a été supprimée dès 2010.
L’article L. 5542-49 du code des transports précise la compétence du tribunal judiciaire pour les différends liés à une sanction disciplinaire prise par l’employeur contre le marin, en se référant aux art. L. 1333-1 à L. 1333-3 C. trav.
L'article R. 211-6 COG envisage la compétence du domicile du marin, du port d'embarquement ou de débarquement du marin. Le marin peut aussi saisir le tribunal judiciaire du port où l'employeur a son principal établissement ou une agence ou, à défaut, le port d'immatriculation du navire.
Sur la conciliation préalable obligatoire auprès du directeur départemental des Territoires et de la Mer (DDTM),
v. Fiche Pratique "Litiges individuels du travail concernant les marins"
Il existe devant le tribunal judiciaire une procédure de référé permettant d’obtenir des mesures urgentes mettant fin à un trouble manifestement illicite ou conservatoires ne se heurtant pas à des contestations sérieuses (art. 834 C. Procédure Civile). Cette procédure de référé ne nécessite pas une conciliation préalable auprès de l’administration maritime.
Les litiges collectifs de travail - Tribunal judiciaire
Le contentieux du travail en France est caractérisé par sa dispersion. Le conseil de prud'hommes, pour les travailleurs terrestres et les gens de mer non marins, n'est compétent que pour les litiges individuels de travail. Il en est ainsi même quand plusieurs litiges sont conduits par plusieurs salariés contre un même employeur. Il en était de même du tribunal d'instance pour les marins.
Les litiges collectifs opposent un syndicat, une institution représentative du personnel (comité social et économique, CSE) à un employeur, sans qu’il n’existe entre eux un contrat de travail. Ces litiges collectifs de travail relèvent du tribunal judiciaire (art. L. 211-3 C. Organis. Judic.). Le recours d’un syndicat représentatif, signataire d’un accord ou d’une convention collective, en application ou interprétation de ce texte relève du TJ ; il en est de même d’une demande d’annulation d’une disposition conventionnelle par un syndicat non signataire. Il en va de même d’une demande d’annulation d’une délibération du comité social et économique (CSE), de la contestation de la désignation d’un expert, par une institution représentative du personnel, de sa mission ou de sa rémunération. Le TJ est compétent sur la contestation par une entreprise du préavis syndical de grève, dans le cadre de la gestion d’un service public (Cass. soc., 25 janvier 2012, n° 10-26237, Dr. soc. 2012, n° 4, pp. 433-436, DMF 2012, n° 746, 326-333 - Cass. soc., 8 octobre 2014, n° 13-13792, SNCM c/ Syndicat CGT des marins de Marseille, DMF 2015, n° 766, pp. 131-139).
Le tribunal judiciaire est compétent concernant le contentieux des élections professionnelles dans l’entreprise, au comité social et économique (art. L. 2314-32 C. Trav.), ainsi que les litiges concernant la désignation des représentants syndicaux, délégués syndicaux ou représentants de la section syndicale (art. R. 2143-1 et L. 2324-23 C. Trav.).
Litiges administratifs - Les décisions de l’administration peuvent elles faire l’objet d’un recours gracieux, hiérarchique ou d’un recours contentieux devant les juridictions administratives. Il semble que l’administration maritime puisse refuser une demande de conciliation, lorsqu’elle estime que la demanderesse est un gens de mer non marin, une hôtesse sur un navire (Cass. soc., 7 février 2024, n° 22-18.245, DMF 2024, n° 871, pp. 711-720, obs. A Bugada – « Gens de mer marins et gens de mer non marins : illustration », 1er mars 2024).
Wallis et Futuna et travail maritime international - Conseil de prud'hommes
Outre le tribunal du travail de Wallis et Futuna (98600 Uvea), le conseil de prud'hommes est seul compétent pour connaître des litiges entre armateur et marin portant sur la conclusion, l'exécution ou la rupture du contrat d'engagement maritime sur un navire immatriculé à Wallis-et-Futuna ; l'article L. 5542-48 du code des transports n’est pas applicable à Wallis-et-Futuna (Cass. soc. 11 décembre 2024, n° 22-21881, Sté Shipping Cruise Services Ltd c/ M. G. et Sté Club med, navire Club med 2, DMF 2025, n° 876, obs. P. Chaumette).
La compétence du conseil des prud’hommes a été reconnue dans le contentieux international du travail maritime, notamment concernant le yachting méditerranéen, sur le fondement de l’article R. 1412-1 du code du travail (CA Aix-en-Provence, 17ème ch., 12 décembre 2013, navire S/Y Tatouey, DMF 2014, n° 763, 869-877). Le règlement. 1215/2012 du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, s’applique. La cour d’appel d’Aix avait déjà rattaché la relation de travail maritime au port d’exploitation du navire et à la compétence prud’homale. Le rattachement du litige et de la relation de travail au port d’exploitation du navire a été confirmé par la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE, 4ème ch., 15 déc. 2011, aff. C-384/10, Jan Voogsgeerd c/ Navimer SA, Dr. soc. 2012, n° 3, pp. 315-317, DMF 2012, n° 734, pp. 219-233, RDT 2012, n° 2, pp. 115-119) et pour un travail effectué à partir d’un port français à bord d’un navire immatriculé à Malte (Cass. soc. 28 mars 2018, n° 16-20-746, DMF 2018, n° 803, pp. 514-517). « Le conseil de prud'hommes est seul compétent pour connaître des litiges entre armateur et marin portant sur la conclusion, l'exécution ou la rupture du contrat d'engagement maritime sur un navire étranger » (CA Aix-en-Provence, 10 décembre 2021, n° 20/11511, navire Revenge, DMF 2022, n° 845, pp. 318-332, obs. P. Chaumette - CA Aix-en-Provence, 17 novembre 2023, n° 20/06079, navire S/Y Free Spirit). Le conseil de Prud’homme compétent est celui déterminé par l’établissement où est accompli le travail, ou le domicile du salarié, quand le travail est accompli en dehors de tout établissement (C. trav. art. R. 1412-1).
Une saisie conservatoire du navire permet aussi de retenir la compétence du conseil des prud’hommes du port d’escale, vis-à-vis des créances salariales des marins. (v. Fiche pratique Contrat de travail international).
Les litiges individuels, liés au contrat de travail, d’un gens de mer non marins ou d’un non-gens de mer sont soumis au conseil de prud’hommes (C. trav., art. L. 1411-1).
Le conseil de prud'homme n'est pas compétent pour connaître des litiges attribués à une autre juridiction par la loi, notamment par le code de la sécurité sociale en matière d'accidents du travail et maladies professionnelles (C. trav., art. L. 1411-4, al. 2).
Documents associés
dernière mise à jour le 20/09/2025 à 14:34:18