Litiges individuels de travail concernant les marins
Textes de référence
Art. L. 1311-1, L. 5511-1, L. 5542-1, L. 5542-48 et L. 5621-18 Code des Transports
Art. L. 211-13, L. 221-3, R. 211-3-5 et R. 211-16 Code de l’organisation judiciaire.
Art. 834 Code de Procédure Civile.
Décret n° 2015-219 du 27 février 2015 relatif à la résolution des litiges individuels entre les marins et leurs employeurs, modifié par décret n° 2021-456 du 15 avril 2021
Synthèse
Sous pavillon français, le tribunal judiciaire (TJ) est compétent pour statuer sur les litiges individuels opposant les marins à leur employeur, après tentative de conciliation devant le directeur départemental des territoires et de la mer (DDTM). Le capitaine de navire n’est plus dispensé de cette conciliation préalable.
Il n’en va pas de même pour les marins embarqués sur les navires immatriculés à Wallis et Futuna, ainsi que pour les gens de mer non marins et les non-gens de mer embarqués.A savoir
Le décret n° 2015-219 du 27 février 2015 relatif à la résolution des litiges individuels entre les marins et leurs employeurs, modifié en 2021, modernise la procédure de conciliation préalable, réaffirme la compétence du tribunal judiciaire. La compétence du tribunal de commerce concernant les litiges opposant le capitaine à son employeur, a été supprimée au bénéfice du tribunal judiciaire (TJ), avec conciliation préalable obligatoire également.
Sommaire
La compétence du tribunal judiciaire
L’article L. 5542-48 du code des transports dispose, depuis 2010, que le différend concernant la formation, l’exécution et la rupture du contrat d’engagement maritime est porté devant le juge judiciaire, ce qui concerne les gens de mer marins. Cette instance est précédée d’une tentative de conciliation devant l’autorité compétente de l’Etat, le directeur départemental des Territoires et de la Mer (DDTM). En 2010, a été supprimée la compétence du tribunal de commerce concernant les litiges opposant les capitaines à leur employeur. L’article L. 5542-49 du code des transports précise la compétence du tribunal judiciaire pour les différends liés à une sanction disciplinaire prise par l’employeur contre le marin, en se référant aux articles L. 1333-1 à L. 1333-3 du code du travail.
Le décret n° 2015-219 du 27 février 2015, modifié par le décret n° 2021-456 du 15 avril 2021, précise la procédure de conciliation préalable obligatoire, envisage la compétence territoriale du tribunal judiciaire (TJ) du domicile du marin, du port d’embarquement ou de débarquement, du port où l’employeur a son principal établissement ou une agence ou le port d’immatriculation du navire (art. R. 211-6 C. Org. Judic.).
Il s’agit ici de litiges individuels de travail opposant le marin à son employeur en lien avec le contrat d'engagement maritime ; les litiges collectifs de travail concernant les marins relèvent aussi du tribunal judiciaire ((art. L. 211-3 C. Org. Judic.).
La conciliation préalable
Le décret du 27 février 2015, modifié en 2021, encadre cette conciliation préalable obligatoire, faite par le directeur départemental des territoires et de la mer (DDTM). Les capitaines n'en sont plus dispensés. Le directeur départemental peut déléguer cette compétence aux agents qualifiés placés sous son autorité. La liste des agents chargés de la conciliation ainsi désignés est publiée au recueil des actes administratifs et sur le site internet du ministère chargé de la mer (art. 2). L’administration peut refuser la demande de conciliation, si elle considère que le demandeur n’est pas marin, mais gens de mer non marins ou non gens de mer, par exemple une hôtesse d’accueil à bord d’un navire ; celle-ci peut contester le refus administratif avec un recours hiérarchique ou un recours au tribunal administratif, ou saisir un conseil de prud’hommes (Cass. soc. 7 février 2024, n° 22-18245, DMF 2024, n° 871, pp. 711-720, obs. A. Bugada, « Pas de conciliation administrative obligatoire pour les gens de mer autres que marins »).
Le DDTM territorialement compétent est celui soit du domicile du marin, soit du port d'embarquement ou de débarquement du marin. Le marin peut également former sa demande auprès du directeur départemental territorialement compétent pour le port où l'employeur a son principal établissement ou une agence ou, à défaut, pour le port d'immatriculation du navire (art. 3).
La demande aux fins de conciliation préalable est formée par tout moyen auprès du DDTM territorialement compétent. Un accusé de réception est remis ou adressé au demandeur par tout moyen permettant d'établir date certaine. Le demandeur indique les noms, prénoms, professions et adresses des parties, ainsi que l'objet de ses contestations (art. 4). La convocation des parties indique leurs noms, professions et domiciles ; le lieu, le jour et l'heure de la conciliation ; l'objet des contestations du demandeur. Les parties comparaissent en personne, sauf à se faire représenter en cas de motif légitime (art. 6). Les parties peuvent se faire assister ou représenter par un marin ou un employeur ; un délégué d'une organisation syndicale ou un représentant d'une organisation d'employeurs ; le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin ; un avocat. L'employeur peut également se faire assister ou représenter par un membre de l'entreprise ou de l'établissement. Le représentant, s'il n'est pas avocat, doit justifier d'un pouvoir spécialement établi à cet effet (art. 7).
Le DDTM ou l'agent désigné pour la conciliation entend les explications des parties et s'efforce de les concilier. La teneur de l'accord, même partiel, est consignée dans un procès-verbal signé par les parties et le DDTM ou l'agent désigné pour la conciliation. En cas d'échec de la tentative de conciliation, un procès-verbal est dressé. Une copie du procès-verbal est remise aux parties (art. 8). Lorsqu'au jour fixé pour la tentative de conciliation, le demandeur ne comparaît pas ou n'est pas représenté, il est dressé un procès-verbal constatant la caducité de la demande de conciliation (art. 9). Si le défendeur ne comparaît pas ou n’est pas représenté, un procès-verbal est établi constatant le défaut de conciliation ; une copie est remise au demandeur (art.10).
La saisine du tribunal judiciaire par requête
En cas de procès-verbal d'échec de la tentative de conciliation ou en cas de procès-verbal de défaut de conciliation, le demandeur peut saisir le tribunal judiciaire de tout ou partie de ses contestations par requête remise ou adressée au tribunal judiciaire compétent désigné à l’article R. 221-16 du code de l’Organisation Judiciaire. Une copie du procès-verbal de non-conciliation y est jointe. Les pièces outre les mentions prescrites par l'article 57 du code de procédure civile, la requête doit contenir, à peine de nullité, un exposé sommaire des motifs de ses contestations. que le demandeur souhaite invoquer à l'appui de ses contestations sont jointes à sa requête en autant de copies que de personnes dont la convocation est demandée. Le greffier convoque les parties dans les conditions du premier alinéa de l'article 756 du code de procédure civile. Une copie du procès-verbal de non-conciliation y est jointe (art. 11).
La jurisprudence a rappelé ces exigences, conditions de recevabilité de la demande (Cass. soc. 18 février 2014, n° 12-29601 et 12-29622 ; CA Aix-en-Provence, ch. 4-6, 15 mars 2024, n° 22/13352 et n° 20/096, DMF 2024, n° 871, pp. 689-698). Le demandeur peut aussi ne pas poursuivre la procédure. La Cour de cassation a considéré que la tentative de conciliation devant l'administrateur des affaires maritimes, constituait un acte interruptif de prescription, dans une hypothèse où le marin avait mis plusieurs mois à saisir le tribunal (Cass. soc. 23 février 2000, n° 97-45816, X. c/ Port autonome de Rouen – Cass. soc. 24 mars 2004, n° 02-40574, Cie Méridionale de Navigation c/ Paris, DMF 2005, pp. 146-148 - Cass. soc. 10 janvier 2017, DMF 2017, n° 790, pp. 308-310 ).
Procédure de référé.
Il existe devant le tribunal judiciaire une procédure de référé permettant d’obtenir des mesures urgentes mettant fin à un trouble manifestement illicite ou conservatoires ne se heurtant pas à des contestation sérieuse (art. 834 du code de Procédure Civile). Ces procédures de référés ne nécessitent pas une conciliation préalable auprès de l’administration maritime.
Cette fiche a été produite en mai 2015 et refondée en septembre 2025 ; elle est téléchargeable dans les "Documents associés".
Documents associés
dernière mise à jour le 20/09/2025 à 19:26:13